Pour un urbanisme relationnel

Nous nous positionnons en faveur d’un urbanisme qui œuvre pour la cohérence et l’autonomisation des territoires, appréhendés à la bonne échelle, en interrogeant d’abord les besoins des populations locales et en mobilisant les potentiels endogènes. Cet urbanisme est relationnel parce qu’il nécessite d’étudier et d’agir sur les relations intra et extraterritoriales, qui sont la conjonction :

  • D’équilibres ou déséquilibres entre les trois fonctions territoriales de base : l’économie, l’habitat, les aménités (équipements et espaces publics, services marchands) ;

  • De flux correspondant aux échanges physiques entre ces fonctions, assurés par un système de mobilités.

Plus l’ensemble est cohérent, plus le système est en équilibre et moins il repose sur des flux extraterritoriaux.

« Il faut toute une région pour faire une ville. »

— Patrick Geddes, Civics, in Sociological Papers, 1904

Pour un urbanisme tactique

En se réclamant de l’urbanisme, l’agence Belvédère revendique une vision transversale d’une discipline étendue dont elle ne couvre pas tous les champs, sans qu’aucun d’eux ne la résume à lui seul.

Appréhendés schématiquement, deux domaines sont en général considérés pour décrire les pratiques de l’urbanisme. À l’amont le stratégique, celui de l’analyse, des choix forts et du temps long, qui recouvre les champs de la prospective, de l’aménagement du territoire, et de la planification (territoriale et urbaine). À l’aval l’opérationnel, celui du concret et de l’action, qui recouvre les champs de la composition, de l’aménagement, de la promotion et de la construction. L’urbanisme stratégique définit un projet de territoire à partir d’une étude des besoins, quand l’urbanisme opérationnel met en œuvre des projets locaux déterminés à partir des capacités du territoire : marchés privés, puissance publique, collectifs citoyens.

Or l’adéquation du projet local avec la stratégie de territoire n’est pas toujours assurée. L’urbanisme tactique, comme nous l’appelons, ambitionne de mieux « connecter » ces deux sphères, en affirmant (1) la prévalence du projet de territoire sur le projet local et (2) la prévalence des besoins sur les capacités. Cela implique le cas échéant des actions visant à modifier les capacités du territoire, en orientant les acteurs (incitations réglementaires ou fiscales), en régulant le marché (subventions, encadrement des prix) ou en le contournant (projet public), mais aussi à s’appuyer sur les alternatives locales transformatrices.

Sans nier les déterminismes territoriaux et politiques, nous avons à cœur de montrer les marges de manœuvre existantes ou à imaginer pour que les territoires reprennent la main sur leur destinée, quitte à sortir des logiques prêtes-à-porter ou à briser certains tabous tels que la décroissance, lorsque les conditions se prêtent à un regard positif sur le sujet.

« Tout projet est une transformation, c’est une activité relative, le passage d’un état des lieux à un autre. »

— Alexandre Chemetoff, Le plan guide, 2010

trajectoire territoriale

En appréhendant la dynamique de ces relations sur le temps long émerge une trajectoire territoriale. Cette notion est centrale pour nous car elle permet, dans une vision relationnelle et systémique, de comprendre le chemin que le territoire a pris ou est en train de prendre, et là où il peut mener.

Pour ce faire, nous mobilisons une démarche en trois temps :

  • Analyser et comprendre la trajectoire passée et actuelle du système territorial ;

  • Proposer, faire discuter, fonder ensemble les inflexions à apporter à cette trajectoire pour un avenir choisi, c’est-à-dire se projeter dans un « nouvel état » du système territorial ;

  • Concevoir les actions les plus efficaces, à l’échelle de l’espace de projet considéré, pour contribuer à mettre en œuvre ces inflexions.

Passeurs

Afin d’enrichir et de permettre une meilleure appropriation des pistes de projet, l’agence mobilise références et modèles avec l’intention de se faire les passeurs des initiatives vertueuses. Les références sont convoquées pour certaines propriétés précises. Les modèles, eux, doivent être appréhendés dans leur globalité, comme pouvant constituer un horizon de projet fertile ou même inspirer un nouvel imaginaire politique.

Il ne s’agit pas de plaquer des solutions standardisées, mais d’admettre avec enthousiasme que « l’innovation » que l’on recherche existe sans doute ailleurs, dans une version à ajuster aux spécificités locales, et peut-être même déjà ici, qu’il s’agisse de signaux faibles à accompagner ou d’initiatives bien engagées à amplifier. Ce qui suppose un échange attentif avec les acteurs locaux et les porteurs de projet potentiels.

Visite de la Cité Artisanale de Valbonne, juillet 2024